Yvette Marie E. Chua French 300 Nathalie Burle
Dés que j’ai discerné le déclic de la
serrure, mes épaules poussent contre la porte cochère, l’ouvrant bruyamment. Cette
ancienne porte verte en fer forgé s’ouvre sur un petit vestibule pavé où la
boîte aux lettres métallique est située. Un peu plus loin du vestibule, au cœur
de l’immeuble, je traverse la cour découverte, entourée de murs blancs. Quand
on lève ses yeux, on remarque tous les étages de cet ancien immeuble : les
cinq rangées de fenêtres avec des volets en bois ouverts, les balcons en fer au
coin des premières et deuxièmes étages, et les petits chambres de bonnes au
sommet de l’immeuble. Normalement, cette cour pittoresque est peuplée de locataires
qui aiment se promener parmi les pots de fleurs fraîches. Mais aujourd’hui, seulement
le miaulement doux d’un chat gris m’accueille chaleureusement. À
l’arrière-plan, j’observe Mme Dubois arroser les fleurs tendrement tout en
chantant faux. Je vais tout droit vers l’intérieur de l’immeuble où on trouve l’escalier
rouge en colimaçon qui me donne des cauchemars. Après avoir monté cet escalier
interminable chaque jour, je me sens comme Raiponce sur son chemin à son tour
de morosité.
Tout seule, j’habite dans un petit
appartement au cinquième étage. Ma porte rouge en bois donne l’air d’un espace
vibrant, mais en réalité c’est le contraire ; mon appartement est aussi
banal que le cours de M. Martin. La porte s’ouvre sur un couloir étroit
où les murs en bois sont peints en blanc, mais maintenant, ils sont transformés
en un gris moulé dégoûtant à cause de la vieillesse. Au moment où j'entre dans
mon appartement, l’odeur de moisi
qui émane des murs délabrés obstrue mes narines. J'accroche mon manteau rouge laine sur le portemanteau gothique près
de la porte. Des toiles d'araignée pendent du plafond, effleurant le sommet de
ma tête. À chaque pas, le grincement du vieux parquet provoque le battement
rapide de mon cœur. De plus, l'absence de fenêtres n'aide pas l'ambiance
morose ; en fait, une seule fenêtre avec les rideaux en dentelle illumine
la kitchenette et le salon en face d’elle.
Contrairement à la charpente négligée de
mon appartement, le coin dans lequel la kitchenette et le salon se fourrent est
tellement ordonné : une fourchette, une cuillère, une assiette, et une
tasse sont alignés soigneusement comme des petits soldats dans une rangée sur
le plan de travail impeccable. À coté de lui, un réfrigérateur vide et une
petite gazinière attendent d’être utilisés. Parce que la causeuse touffue se
repose en face d'eux au lieu d'une table, la kitchenette devient le salon en
quelques pas. La petitesse de ce coin ne me dérange pas, mais c’est plutôt sa propreté;
le fouillis réconfortant que la cuisine chaleureuse de ma mère avait émis me
manque toujours. Sans une famille ou des amis avec qui je peux partager un
repas à la table ou une conversation au salon, je passe rapidement devant ce
coin comme d’habitude. Je me tourne vers la porte-fenêtre verte à droite de la
causeuse qui s’ouvre à mon endroit préféré dans cet appartement, ma chambre.
Je m'effondre dans mon lit moelleux qui
me rebondit comme une plume. Enveloppée dans du couvre-lit matelassé, je
regarde tranquillement le coucher du soleil scintillant à travers la fenêtre
blanche en face de mon lit. Pendant un moment, ma chambre est ensoleillée ;
un à un, la lumière du soleil caresse les photos et les dessins qui orne mes
murs. Le soleil se couche dans un ciel orange, presque la même couleur que mon
lit, et il semble que ma chambre et le ciel se confondent en une couleur
profonde. Mais en quelques minutes, ma chambre est plongée dans la
pénombre encore une fois. D’une certaine façon, même si je n’aime pas
l’admettre, cet appartement me représente ; coloré à la surface, mais tout
vide en réalité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire